Bricolages · Couture, etc… · Chaussures viking

En cherchant des patrons de chaussures, j'ai évidemment pas trouvé grand chose sur internet, à part des chaussures médiévales, romaines, etc…

Donc une chaussure médiévale en particulier a attiré mon attention: la chaussure viking. J'ai trouvé la conception élégante.

J'ai trouvé ce tutoriel https://annaleshistoriae.blogspot.com/2013/08/adventures-in-medieval-shoe-making.html intéressant, et je me suis lancé.

J'ai aussi trouvé cette doc http://www.personal.utulsa.edu/~marc-carlson/shoe/SHOES/SHOE4.HTM

J'avais des semelles en pneu de voiture ferraillé de l'Ouganda, je me suis lancé.

La difficulté de cette première paire a été la couture de la semelle ferraillée (les fils d'acier des pneus sont très durs, meme un marteau+clou et une mèche acier HSS peinent), et le fait que les deux semelles n'avaient pas la meme circonférence, il y a donc eu une chaussure avec les orteils un peu serrés, et l'autre avec beaucoup de place.

L'autre chose, c'est qu'on est sur une chaussure avec une seule épaisseur de cuir de 1.4mm, du collet naturel végétal. J'ai eu peur d'utiliser du cuir plus épais de 2.6mm, mais je pense que le cuir serait moins souple et s'étirerait moins. Le coté positif c'est que la chaussure a bien travaillé, et vite pris la forme du pied.

Cette chaussure a un drole de maintien, et un serrage qui se fait seulement en maintenant le talon. Donc il y a un serrage diagonal entre le cou du pied et le talon. J'ai fait deux boutons qui permettent de répartir mieux la force, j'ai bien fait (meme si les deux "oreilles" de support du bouton se téléscopent à l'usage).

Ces chaussures se sont révélées très pratiques à l'usage, grace à leur semelle en pneu de voiture. On peut sauter à pieds joints sur une beche sans avoir peur d'abimer la chaussure. Elles sont un peu comme des pantoufles, avec pas mal de jeu, mais les pieds ne se mouillent pas facilement, et elles sont bien adaptées pour bosser dans les champs.

Le montage sandalette de la semelle est "obsolescent", meme s'il est fait avec du fil très costaud (du fil de lin toulemonde en 332). Par la suite je suis passé à un montage norvégien à ma manière.

Voici les photos:

 

Un autre problème que j'ai eu avec ces chaussures, c'est la découpe du patron qui était fausse. J'ai du recouper pour que le pied rentre dedans. Ça donne un aspect bizarre, il y a une sorte de trou sur le devant de la cheville.

Donc pour les suivantes j'ai corrigé cette erreur à l'étape du scotch (j'en parle plus loin), en mettant deux boutons indépendants, un va s'occuper du maintien entre le talon et la partie haute du cou du pied, l'autre va s'occuper du maintien entre la partie basse du cou du pied et le bas.

Voici les photos:

Sur cette dernière photo on voit bien la qualité du cousu norvégien, qui simplifie et solidifie. Et simplifie le resemelage. L'usure des trous sur lesquels les fils vont appuyer se fait sur la bande (trépointe) et non sur toute la partie haute de la chaussure (tige).

Les problèmes que j'ai eus avec cette chaussure, ce sont les erreurs de circonférence semelle/tige, le manque de rembourrage autour de la partie haute de la cheville, et le fait qu'au niveau de la fermeture 4 épaisseurs peuvent se superposer, ce qui est inconfortable, et désagréable.

J'ai corrigé ces défauts dans la version qui suit.

J'ai cousu une première épaisseur de 3mm de latex naturel, et thermosoudé par-dessus (au fer à souder) une deuxième épaisseur du meme latex.

Ça permet d'avoir le fil de couture protégé, et une semelle de 6mm. Quand on thermosoude, il faut passer vite avec le fer à souder, de sorte à ne surtout pas chauffer trop fort le latex. S'il se liquéfie ou crame, il perd ses propriétés. Il faut avoir la bonne température pour juste le ramollir.

 

 

Première étape: dessin du pied.

Un bout de carton rigide c'est très bien, et ce sera très bien pour la suite!

Le tracé rouge c'est le tracé au plus proche du pied.
Le tracé vert c'est la "moyenne", enfin un tracé raisonnable à faire.

Le tracé noir c'est la marge de couture, qu'on va découper par la suite.

Un peu plus que ce que j'ai fait c'est meme mieux, mais ce que j'ai fait fonctionne.

 

On découpe la marge de couture, pour avoir une semelle qui va nous servir à avoir quelque chose de rigide pour faire le patron.

Si on prend du papier, ou qu'on enroule juste le pied de scotch, on aura une erreur de voute plantaire sur le patron de la tige (le haut de la chaussure).

En effet, la semelle en carton rigide permet d'avoir une semelle fiable qui fait partie du patron.

 

Voici la semelle qui va nous servir à tracer le contour de la semelle intérieure.

Pour le patronnage au scotch de la photo qui suit on enlève la bande extérieure correspondant à la marge de couture. 

 
On pose le pied bien au milieu sur la semelle, et on se met à mettre du scotch.

Cette étape est hyper importante, bien sur.

On peut à ce moment choisir de faire une chaussure montante, ou basse, d'etre au plus près du pied ou de laisser de la marge (en utilisant des grosses chaussettes sous le scotch, ou d'autres moyens).

Le tracé de la découpe est aussi très important. Simplement s'il est mal fait on rentre pas dans la chaussure (et faut recouper par la suite, ce qui m'est arrivé), ou alors on a pas un bon maintien ou des coutures au mauvais endroit, etc…
 
 
 
Vu de coté.

En gros le pied a une sorte de ligne de crete (avec des tendons, en tout cas c'est pas statique) qui monte vers le cou du pied.
Il y a donc une partie avant assez basse avec les orteils, et une partie qui monte jusqu'à la cheville.

Le maintien de cette chaussure se fait entre la ligne de crete près du cou du pied et le talon d'une part (en diagonale vers le bas, en arrière), et entre la ligne de crete près des orteils et le bas d'autre part.

La chaussure montante nécessite du rembourrage tout autour de la cheville, au niveau du cou du pied. Sur cette chaussure il n'est pas encore suffisant pour avoir un confort correct (mais c'est utilisable).
 
 
 
On découpe le scotch le long de la ligne que j'ai tracé sur le scotch d'une part, et le long de tout le pourtour de la semelle d'autre part.

On obtient une pièce de scotch qui n'est pas du tout plate, et la mettre à plat pose quelques problèmes qu'on peut résoudre.

Ici https://annaleshistoriae.blogspot.com/2013/08/adventures-in-medieval-shoe-making.html on voit bien le coté bombé du scotch découpé.

Ici https://handmadebycarolyn.com.au/2016/03/how-to-make-your-own-shoe-pattern.html ils donnent la solution (que j'ai pas mise en oeuvre - j'aurais du!!) pour mettre à plat les parties qui sont bombées, en particulier la zone près du talon, et celle près des orteils.

Ce que j'ai fait, c'est choisir d'avoir sans plis et donc avec la longueur exacte la partie basse le long de la semelle (ce qui est le plus important!), et d'avoir avec des plis (et donc moins long) la partie haute autour du talon.

C'est pas très bien, parce que ça génère un angle, et un certain inconfort. Le cuir est souple et travaille, mais ça prend du temps, et comme j'ai doublé la chaussure, vaut mieux faire tout de suite quelque chose de bien et ne pas refaire cette erreur.
 
 
 
À partir du scotch j'ai fait en papier un patron.

J c'est pour jonction, A pour arrière du talon, et PO pour petit orteil (en fait c'est le gros orteil je me suis planté :)

Entre A et PO on voit très bien la courbure de la voute plantaire, qui correspond très bien à celle de la semelle.

À coté du J de droite, il y a deux "oreilles" qui servent de rabats, et de supports pour les boutons. Bien penser à les rajouter.

Les oreilles ne doivent pas affleurer sur le bord haut, c'est pour ça qu'il y a un déport et que ces oreilles ne prennent pas toute la largeur.
 
 
 
En bas, patrons de la doublure intérieure, du renfort du talon (pour éviter que l'intérieur en contact de l'arrière du talon ne s'use trop vite), et de la bande de rembourrage.

La partie près du J de droite où sur l'autre pièce il y a les "oreilles" est plus basse que sur l'autre pièce, pour éviter que 4 épaisseurs ne se superposent quand on ferme la chaussure (ce qui est bien inconfortable, je l'ai aussi expérimenté).
 
 
 
Les deux pièces de cuir découpées, avec la pièce de renfort contre l'abrasion du talon.

Les petites languettes près du bord haut de la chaussure seront pliées à la couture de la doublure (ça va faire marrer des gens, mais bon j'ai trouvé cette solution).
 
 
 
On voit la bande de rembourrage, et la lame à parer qui taille dans l'épaisseur les petites languettes.

Si on le fait pas, le bord haut de la chaussure va etre trop épais, ce qui est trop rigide, et inconfortable.
 
 
 
L'ensemble, avec la semelle intérieure, appelée première de montage.

Cette première de montage je l'ai faite dans un collet à tannage végétal de 2.6mm. C'est un cuir assez "tendre" qui va s'user.
Normalement il faut prendre du croupon, plus épais (3.5mm minimum), et tanné de sorte à avoir bien plus de dureté.

Mais à ce moment j'avais pas ça sous la main.

Les autres pièces sont faites avec du cuir de 1.4-1.6mm, aussi du collet végétal. Ce cuir est plus rigide que des cuirs avec d'autres tannages, mais je voulais quelque chose sans produits chimiques (comme le chrome, l'alun, etc…).
Et l'odeur est hyper agréable (ça sent le chene, la foret et derrière il y a cette odeur animale du cuir).

Il y a apparemment des types de tannage, d'épaisseurs, et de cuirs adaptés à chaque partie de la chaussure. Ce que je ne fais pas vraiment pour cette chaussure.
 
 
 
Couture du rembourrage.

Il est un peu minimaliste ou spartiate, il faudrait plus, moins "dur", plus étendu en hauteur, plus épais…!

C'est une cordelette en laine cousue dans un rectangle de cuir.

Là on voit qu'il est fermé en bas et sur les cotés. La fermeture du haut se fera avec la couture de la doublure.
 
 
 
Couture de la doublure.

Pour les outils, conseils pour coudre, etc… le site d'Eric Deneken m'a beaucoup aidé, tout est bien expliqué, et j'aime bien l'approche, qui privilégie des bons outils et du cuir naturel.
https://www.esprit-cuir.fr/tutos-d-artisan-d-art/le-point-sellier/

Il y a aussi le livre "The Art of Hand Sewing Leather" de Al Stohlman. Certains des conseils de ce livre contredisent le site d'Eric Deneken, ce qui est assez étonnant. Mais je pense qu'il est intéressant d'avoir les deux informations.

 On voit sur la photo les alène losange et ronde. Ce sont les versions haut de gamme, à fer interchangeables, réglables, etc… L'alène losange tranche large, le losange créé est plus haut et plus large que mon autre alène losange plus "bas de gamme".

 

 

Pour fermer la chaussure en mettant face à face les deux J qu'on voit sur le patron j'ai fait un zigzag que j'ai vu dans le bouquin d'Al Stohlman.

C'est peut-etre un peu bourrin, ou pas très régulier, en tout cas les deux morceaux de cuir s'alignent bien, et tiennent bien.

Il y a une vidéo qui m'a l'air bien plus convainquante que ce que j'ai fait: https://www.youtube.com/watch?v=BNqhVimC7zM

Ce zigzag va permettre de faire tenir ensemble les deux épaisseurs de la doublure. Par-dessus, je coud une bande de cuir, pour que ça soit plus solide, et plus étanche.

 

 

 

Couture de la bande, par dessus le zigzag.

 
 
Couture du premier support pour bloquer le bouton.

J'ai pris du cuir plus épais de 2.6mm pour ça.

Ça tiendra mieux dans la durée.
 
 
 
Couture du deuxième support de bouton.

On voit qu'ils n'ont pas la meme inclinaison, parce que le serrage se fait pas dans les memes directions.
 
 
 
Préparation de la bande qui fera tout le tour (trépointe), qui permet de relier semelle (première/semelle intérieure et semelle d'usure) et haut de la chaussure (tige).

Ça doit etre fait dans un cuir assez costaud, et meme assez épais.

J'ai pris du cuir de 2.6mm. En fait ça se plie pas vraiment une fois la chaussure finie, il faut le plier en deux sur toute la longueur, avec une pince, après l'avoir graissé.

Donc là j'ai fait l'erreur de pas l'avoir pré-plié.

L'outil qu'on voit est l'outil qui sert à creuser des rainures dans le cuir (rainette), ce qui protège le fil de couture.
 
 
 
Couture de la trépointe sur la tige.

Faut pas se louper, et faire bien attention à pas etre trop près du bord, bien prendre les deux épaisseurs…
 
 
 
Couture de la semelle intérieure et de la semelle d'usure (en latex naturel) sur la trépointe.

Semelage, en gros.

J'aime bien faire cette étape en deux parties, et commencer par l'arrière. Il faut pas qu'il y ait de décalage, donc c'est important de bien se repérer, et positionner tout.

J'ai triché avec le mini serre-joints.
On peut un peu jouer et rattraper les erreurs, mais pas trop.

Il y a tout un problème de circonférence. Il vaut mieux que la circonférence de la semelle soit plus grande que celle du bas de la tige, plutot que la circonférence de la tige plus grande.

Dans le premier cas, on aura les orteils serrés, ça sera un peu étroit et tendu (ce qui peut etre bien avec une seule épaisseur parce que le cuir travaille facilement, mais bien genant quand c'est doublé), dans le deuxième cas ça fera des plis si on arrive à rattraper, et dans le pire des cas on finit tout le tour et il reste un gros pli moche irratrappable.

Ce qui est assez terrible avec cette étape, c'est que jusqu'à la fin on sait pas si ça va aller.

D'où mon approche de patronnage ou on découpe la marge de couture, et où on aggrandit surtout pas le motif crée par le scotch.

Si on veut etre un peu plus serré on peut aggrandir la marge de couture au niveau de la semelle (celle qu'on découpe), sachant qu'on peut encore rattraper un peu tout ça avec la couture de la trépointe.
 
 On voit sur la photo mon autre alène losange, qui est complémentaire à l'autre, et bien pratique quand on a moins de place pour coudre.
 
 
L'étape avec la semelle en latex naturel.

Je pourrais thermosouder par-dessus une deuxième semelle. Et comme ça on marche pas sur les fils.

Ce latex est d'assez mauvaise qualité, pas très dense, pas très résistant à l'abrasion, et pas très solide.
Donc pour faire les trous dans le latex j'ai remarqué qu'il vaut mieux les faire à l'alène ronde qu'à l'alène losange qui tranche.
 
 
 
Couture de la pièce qui va supporter les noeuds d'arret des boutons.

Je coupe deux fentes, et je mets des trous de 2mm à leurs extrémités, pour que ça soit plus solide.

Il y a un morceau de cette pièce qui s'avance un peu plus vers les orteils, qui permet de couvrir un "trou" laissé par la jonction et les oreilles.

Pour les boutons, c'est bien expliqué ici:
https://3.bp.blogspot.com/-vdyGrQpZ2Tw/UhKcWBcfqnI/AAAAAAAAASE/sNwCJzmEj7k/s1600/shoe+2.jpg
C'est la meme chose avec une lanière au lieu de deux. On enroule bien fermement au-dessus des deux coupures, puis on fait leur étape 3 (ils ont pas dessiné qu'il vaut mieux enrouler ferme avant de faire l'étape 3). Il n'y a pas d'étape 4, puisqu'il y a une seule lanière à passer.
 
 
Ici on voit bien les noeuds d'arret qui tiennent les boutons.

Parfois un noeud de huit plus volumineux est nécessaire.
 
 
 
 

Là on voit bien sur la chaussure ouverte le "trou", qui est au-dessus du zigzag couvert par le rectangle, et qui est couvert par la pièce supportant les boutons.

 
 
 
Photo avec le pied dedans, fermée.
Ça va encore travailler, prendre des plis, et il faut encore thermosouder la deuxième semelle en latex en-dessous.
 
Thermosoudure des deux semelles en latex.
 
La semelle en latex blanche est de moins bonne qualité, moins souple, et plus dense. La semelle orangée est de chez Reltex, elle est plus souple, notamment.
 
Pour thermosouder ça, j'utilise un fer à souder.
 
 
Il faut ramollir le latex, mais surtout pas le bruler ou rendre liquide, sinon il perd ses propriétés et ne se soude plus.
Je passe assez vite avec le fer à souder, le long d'une ligne, en essayant de ramollir le latex de manière homogène.
On doit bien observer l'aspect pour voir qu'il est ramolli, mieux vaut moins chauffer que plus.
 
Ensuite, quand le long de la ligne le latex est bien ramolli, j'appuye fort pour serrer les deux semelles l'une contre l'autre, pour qu'il y ait un bon contact pour la soudure.
Je déroule la semelle du haut et soude à la jonction des deux semelles. Bien faire attention à bien guider. Je coupe l'excédent aux ciseaux pour que les bordures des deux semelles soient bien alignées.
 
Et voici le résultat:
 
 
 
Un autre problème de patronage est la zone du talon.
Sur cette photo on voit clairement que les patrons anciens avaient prévu ce problème:
 
 
L'entaille en triangle a pour role de compenser, d'améliorer le maintien du talon en s'approchant mieux de sa courbure naturelle.
 
À mon avis le tracé du triangle devrait etre courbe et non droit. À l'étape du scotch on doit pouvoir tracer une ligne au niveau du talon, puis couper à cet endroit pour avoir ce motif en triangle.
 
J'en dirai plus si j'arrive à mettre ça en pratique.
 
 

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